Je ne m’attendais pas à un tel engouement pour la projection du film Wùlu de Douada Coulibaly, jeune réalisateur franco-malien. Était-ce aussi dû au fait que l’événement était gratuit? J’espère que ce n’était pas qu’un simple effet de mode.
Le film raconte l’histoire d’un jeune homme du nom de Nadji. Chauffeur de bus, il rêve de pouvoir s’acheter son propre véhicule. Mais la désillusion le rattrape très vite.
Il finit par accepter un boulot de passeur pour stupéfiant. La technique est bien rodée. Il transporte de la viande bovine dans des camions réfrigérés, qui contiennent une mince trappe à l’arrière, où la marchandise est stockée. Accompagné de deux acolites, il arrive avec habileté à passer les contrôles de douanes pour la Mauritanie, le Sénégal et en Guinée-Conakry.
Bien évidemment lors d’un convoi raté, un de ses compagnons meurt suite à des blessures par balle. Il est alors abandonné vulgairement dans les champs, sans aucune sépulture. Cela affecte le second camarade qui sombre peu à peu dans la drogue (ou l’alcool). Il finira lui aussi par disparaître.
Le film est ponctué de violence et de sexe. Ingrédients magiques pour une réussite?
Avec sa fortune, Nadji sort sa soeur, Aminata, de la prostitution. L’actrice n’est autre que la chanteuse Inna Modja. Son jeu m’a plu. La réplique que j’ai retenu est la suivante: « Je suis peut-être une pute, mais toi tu es devenu un chien. »
Si l’on récapitule, c’est un frère et une soeur, pauvres, au Mali. Le frère devient vendeur de drogue pour un patron blanc. Il gagne beaucoup d’argent d’un coup, dépense tout pour s’acheter une immense villa. Il veut ensuite se marier avec la fille d’un homme respecté, croyant que l’argent peut tout acheter.
Je n’ai absolument trouvé rien d’original au film. Mais cette fiction tend à rappeler les bouleversements politiques maliens en 2012 où le trafic de cocaïne fut en grande partie responsable.
Une vision patriarcale nous est donnée à voir:
Je suis l’homme, donc je protège ma sœur
Je suis l’homme, donc je demande une femme en mariage à son père. Je veux une fille bien, pas une pute. Forcément.
La sœur: Mon frère a de l’argent, alors je peux arrêter de travailler et j’accepte qu’il m’entretienne.
Et j’en ai vraiment ras-le-bol de l’hyper-sexualisation du corps de la femme noire. C’est le seul angle qu’on donne à voir. Femme=séductrice, tentatrice. Vraiment? On en est encore là?
De plus, a sœur a peu de dialogues et d’ailleurs ce qu’elle dit est rarement profond.
Bref, à la fin du film, je n’avais toujours pas compris son si grand succès. Il manque, selon moi, de la finesse.
(revue écrite à chaud après la projection, Berlin, 2018)